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Re: Definition de l'espace et du temps

Message non luPublié :jeudi 7 février 2008 à 23:32
par MIMATA
En fait, je crois comprendre pourquoi je ne comprenais pas...
C'est le terme de désordre qui me semble impropre. En fait, cette notion d'ordre est toute relative et le rangement est une question d'appréciation personnelles... certains couples l'expérimentent fréquemment...

Il semble plutôt s'agir de "destruction", de perte de diversité, je ne trouve pas de terme approprié.

Re: Definition de l'espace et du temps

Message non luPublié :samedi 9 février 2008 à 19:10
par quantique
Plus un système est désordonné, plus son entropie est grande ; inversement, plus un système est ordonné, plus son entropie est faible. Un système physique tend donc par défaut à évoluer vers un plus grand désordre car la probabilité d’obtenir, lors d’un réarrangement, un système désordonné, est considérablement plus importante que celle de parvenir à un système hautement ordonné (plus un système est ordonné plus il est ouvert/exposé à une augmentation d’entropie).

Par exemple, les particules de CO2 dans une petite bouteille de Coca sont dans un état de faible entropie (le système est ordonné, il y a un nombre important de molécules de CO2, 10 24 environ, dans un volume restreint (celui de la bouteille)) ; par contre, si l’on ouvre la bouteille, les particules vont se disperser dans le nouvel espace (la pièce autour de la bouteille) mis à leur disposition – elles tendent donc vers un système plus désordonné, vers une entropie plus grande.

Dans un système fortement désordonné (de forte entropie), un maximum de réarrangements du système passera inaperçu (les molécules de CO2 sont un peu partout dans la pièce maintenant et le fait de bouger par exemple son bras au milieu de cette pièce ne modifiera pas fondamentalement le désordre ambiant, il sera toujours là).

Inversement, dans un système hautement ordonné (faible entropie), un minimum de réarrangement passera inaperçu car il est peu probable que la modification d’un système hautement ordonné donne encore un système hautement ordonné (un exemple : vous jetez en l’air toutes les pages d’un livre, la probabilité pour que ces pages retombent sur le sol exactement dans l’ordre d’écriture du livre est extrêmement faible dès que le nombre de pages augmente : on est passé d’un système de faible entropie vers un système à haute entropie).

Re: Definition de l'espace et du temps

Message non luPublié :samedi 9 février 2008 à 19:36
par manuelarm
@Quantique

Génial ton explication du phénomène de l'entropie, je trouve des exemples très clair.

Par contre je voudrais revenir un peu sur le sujet, et si le temps perçu était dû à l'entropie. Je m'explique, on prend l'entropie de l'univers du fait de l'expansion de l'univers l' entropie global augmente, d'où le temps. Qu'en pense tu ?

Re: Definition de l'espace et du temps

Message non luPublié :samedi 9 février 2008 à 20:00
par quantique
Bien vu ton lien entre l'entropie et le temps.

Ci-après, un petit "mémoire" à usage personnel (et aidé par la lecture de plusieurs bouquins) que je m'étais fait à propose de l'entropie et du sens (de la flèche du temps) :

L’entropie est un candidat très intéressant pour expliquer la flèche du temps (on va du passé au futur) : le futur serait la direction vers laquelle se dirige le temps, c’est à dire vers un état de plus haute entropie. Notre expérience quotidienne semble être en parfait accord avec le principe que tout système tend vers le désordre (un œuf se casse mais ne se reconstitue pas, un humain vieillit (donc augmente son entropie par un relâchement ce certaines structures moléculaires) mais ne rajeunit pas, un glaçon fond naturellement mais de l’eau tiède ne forme jamais de glaçons, ...).

Ce n’est malheureusement pas aussi simple : en effet, les équations de la physique prévoient, comme déjà évoqué, la symétrie du temps. Ceci revient à dire que l’état d’entropie avant « maintenant » était aussi plus élevé que celui de « maintenant » ce qui pose un réel problème par rapport à notre intuition et ce que l’on constate au quotidien.

Nous sommes donc là face à un dilemme entre l’approche mathématique (par des équations par ailleurs extrêmement efficaces et précises pour expliquer les choses) et ce que nous constatons dans notre vie quotidienne.

Pour mieux aborder cette difficulté, prenons l’exemple des glaçons (tiré du livre de Brian Greene) :

Il est 22h30, nous sommes en train de boire un verre dans un bar ; dans ce verre, de l’eau et quelques glaçons informes (ils sont à moitié fondu) ; nous savons pourquoi ces glaçons sont dans cet état : en arrivant au bar, à 22h00, nous avons commandé un grand verre d’eau avec des glaçons que le serveur s’est empressé de nous servir : de l’eau avec des glaçons entiers et bien cubiques.

Que dit la physique par rapport à la situation du verre et de ses glaçons à 22h30 ? Et bien, sachant qu’il y a symétrie du temps, cela revient à dire que depuis 22h00, l’entropie du système a diminué donc depuis 22h00, le système tend vers un état plus ordonné. Or, un glaçon est un état plus ordonné (les molécules d’eau H20 sont alignées) que l’eau à l’état liquide. A 22h00 donc, les glaçons n’étaient même pas formés : nous avions un verre d’eau tiède, l’eau s’est mise spontanément à refroidir, sans aide extérieure, et des glaçons informes ont commencé à se former ce qui donne le résultat de ce que nous observons à 22h30.

C’est donc l’application concrète de ce que prédit les équations de la physique dans un tel cas et ce scénario est pour le moins déconcertant : personne n’a jamais vu des glaçons se former seuls dans un verre à une température ambiante au dessus de 0° c !!

Bien sur, nous savons ce qui s’est réellement passé : le serveur nous a remis un verre avec des glaçons entiers mais ce scénario, vis à vis des équations, est extrêmement moins probable que le scénario précédent.

On pourra remarquer que notre « vrai » scénario, celui que nous avons vraiment vécu, n’est pas incompatible avec le principe d’entropie puisqu’à compter de 22h00, les glaçons ont commencé à fondre donc le système tend bien vers un état d’entropie plus grand.

On remarque également que si l’on observe la tendance de probabilité des 2 scénarios, celui prédit par les équations physiques est toujours plus probable que celui vraiment observé et ce sur toute la plage horaire de 22h00 à 22h30 (en effet, les 2 scénarios arrivent finalement au même résultat de glaçons en partie fondus à 22h30 mais dans le scénario des équations, nous sommes dans une entropie élevée (nous partons donc d’une probabilité élevée pour descendre vers une probabilité plus « moyenne » à 22h30 – inversement, dans le scénario du « réel », nous partons d’une probabilité très faible car le système est très ordonné, (des glaçons complets) pour monter vers une probabilité « moyenne », toujours celle de 22h30 commune aux 2 scénarios – si l’on trace la courbe des scénarios, celle des équations sera toujours au dessus de celle de notre réalité jusqu’à ce qu’elles se rejoignent sur le point correspondant à 22h30).

Sur ce principe Boltzmann en déduisit que, à l’échelle de l’Univers, avec un nombre de particules abondamment plus important que le verre, il est impossible que notre univers actuel très ordonné en fait (galaxies, planètes, etc.) proviennent d’un système encore plus ordonné – il est donc plus probable (de manière pratiquement absolue) que nous provenons d’un état hautement désordonné et que nous sommes le fruit d’un effondrement entropique de l’Univers, événement rare mais prévue par la loi de la thermodynamique (statistiquement parlant, à un moment ou à un autre, les molécules de CO2 adopteront provisoirement une configuration de distribution dans l’espace qui feront qu’elles retourneront toutes dans la bouteille de Coca; de la même manière, les pages d’un livre jetées en l’air x fois finiront par retomber sur le sol dans l’ordre exacte du livre).

Cette conclusion est déroutante car elle nous amène au fait que tout l’Univers et ce qu’il contient (les galaxies, nous, nos pensées, souvenirs, etc.) ne seraient que le résultat d’un hasard, d’un effondrement entropique rarissime, pratiquement une aberration (cela va plus loin encore car cela signifie que l’on ne sait pas en fait si nous sommes vraiment sur Terre depuis X années, nous ne le sommes peut être que depuis une fraction de seconde, tout le reste de l’Univers (en incluant nos souvenirs qui seraient alors l’illusion d’un passé n’ayant jamais existé) faisant partie de ce qui a été créé instantanément par l’effondrement entropique).

Toutefois, ce raisonnement est une impasse intellectuelle (nous n’avons dans ce cas même plus à nous poser de questions) et n’est peut être pas le bon scénario (espérons-le !).

Cette affirmation de Boltzmann a en fait un rapport très étroit avec l’origine de l’Univers et la théorie du Big Bang.

Cette théorie indique que, dans les premiers instants de l’univers, celui ci était sous la forme d’un gaz hautement ordonné ; le fait de dire que ce gaz était ordonné peut sembler aller à contresens dans ce qui nous paraît évident mais il ne faut pas oublier la présence de la gravitation très forte à cette période et qui contribuait donc à un ordonnancement par attraction gravitationnelle.

La gravitation, dans l’exemple des molécules de CO2 de la bouteille de Coca, est négligeable mais sur la masse de gaz présente au début de l’histoire de l’Univers, la gravitation joue bien un rôle capital : si le gaz est concentré, les particules s’attirent et créent des amas ordonnés (de faible entropie), amas qui donneront plus tard naissance aux galaxies, étoiles, planètes...

Cet aspect de la gravitation n’est pas incompatible avec l’entropie car, même si la création d’un amas équivaut à la formation d’un système hautement ordonné, cet ordonnancement est largement compensé par la chaleur (donc du désordre) dissipée par la compression des gaz et par la lumière émise.

C’est un point important : le tendance naturelle vers le désordre, vers une forte entropie, n’interdit pas la formation de systèmes ordonnés si le solde entropique est respecté.

L’ultime source d’ordre, de faible entropie, serait donc finalement le Big Bang. Depuis, l’entropie globale de l’univers n’a cessé d’augmenter.

Pour en revenir sur la symétrie du temps dans les équations qui impliquent une symétrie de l’entropie par rapport à un instant donné (si l’on part depuis cet instant vers le passé, l’entropie est censée augmenter et si l’on part depuis cet instant vers le futur, l’entropie est également censée augmenter) et effectuons la comparaison avec notre scénario d’un gaz hautement ordonné après le Big Bang ; nous avons donc 2 cas de figure :

1) La symétrie de l’entropie est respecté, nous avons donc un passé plus entropique, plus désordonné ; par rapport à l ‘état fortement ordonné de notre Univers, cela revient à dire que la seule possibilité pour la création de l’univers tel que nous le connaissons proviendrait d’une chute d’entropie créée par une fluctuation aléatoire et rarissime comme il en existe de temps à autre dans tout système à haute entropie ; cette « option » remet absolument tout en cause jusqu’à notre propre existence (et donc le raisonnement que vous êtes en train de lire). Nous serions dans l’hypothèse d’un Univers « instantané » créé par cet effondrement dont le passé n’existerait en fait pas.

2) Après le Big Bang, nous avions donc un gaz hautement ordonné ; ce principe indique que la seule direction possible est donc une augmentation d’entropie ; si nous émettons l’idée qu’à un certain moment, nous allions vers une baisse d’entropie, ceci irait à l’encontre des conditions initiales (le gaz ordonné) que l'on a fixées. Ce sens unique d’augmentation d’entropie inéluctable et forcé par ces conditions de départ font que le futur, direction de l’augmentation d’entropie, est la seule direction possible.

Il faut noter une fois encore que l’état très ordonné de l’univers après le Big Bang est une situation incroyablement moins probable qu’une chute statistique d’entropie !

On peut enfin se poser la question : si la 1ère hypothèse était la bonne, que serait le temps ? Nous serions pratiquement en permanence dans un état de forte entropie avec de temps à autre des fluctuations vers de plus faibles entropies mais qui remonteraient ensuite vers une plus importante (en concordance avec la symétrie du temps) ; on peut émettre alors l’hypothèse que le temps n’aurait plus de direction, les notions de passé et de futur n’étant plus pertinentes. On pourrait parler d’écoulement si par écoulement on entend le constat d’un changement d’entropie mais ce serait un écoulement sans direction temporelle (mentalement très difficile à appréhender ce qui est normal car de toute manière un être humain ne pourrait être présent dans de telles conditions !).

Cette approche est à prendre toutefois avec du recul car même s’il existe un lien très fort entre la flèche du temps et l’entropie, rien ne permet d’affirmer que le temps n’est pas « autre chose ».

Re: Definition de l'espace et du temps

Message non luPublié :mardi 12 février 2013 à 02:28
par The Chemist
Bonjour quantique, en te lisant je me suis posé pas mal de question sur la definition du temps.
Si je t'ai bien compris les equation physique prédisent parfois comme plus probable qu'un événement (qui se produit au temps t ) résulte d'un moments future ( a t+dt) de plus forte entropie plutot que de résulter d'un moment de plus faible entropie passé (à t-dt). Il est plus probable que l'oeuf se reforme plutot qu'il n'est éxisté?

quantique a écrit : On peut enfin se poser la question : si la 1ère hypothèse était la bonne, que serait le temps ? Nous serions pratiquement en permanence dans un état de forte entropie avec de temps à autre des fluctuations vers de plus faibles entropies mais qui remonteraient ensuite vers une plus importante (en concordance avec la symétrie du temps) ; on peut émettre alors l’hypothèse que le temps n’aurait plus de direction, les notions de passé et de futur n’étant plus pertinentes. On pourrait parler d’écoulement si par écoulement on entend le constat d’un changement d’entropie mais ce serait un écoulement sans direction temporelle (mentalement très difficile à appréhender ce qui est normal car de toute manière un être humain ne pourrait être présent dans de telles conditions !).


Cette approche est à prendre toutefois avec du recul car même s’il existe un lien très fort entre la flèche du temps et l’entropie, rien ne permet d’affirmer que le temps n’est pas « autre chose ».


J'imagine l'espace temps comme un livre, en ce moment nous le lisons dans un sens et a une certaine vitesse et notre perception du temps n'est influencé que par cette vitesse de lecture. Cette vitesse de lecture c'est l'entropie, et notre univers evolue dans un cycle ou elle augmente. Mais il est tout a fait possible de lire en marche arriere, cela va nous mener au meme mot, au meme evenement d'instant t. Les variation des fluctuation d'entropie sont peut etre aléatoire dans l'espace-temps, sinon comment aurait été créé la faible entropie du près bigbang? elle résulterait d'une encore plus faible entropie? jusq'ou remonter? le big bang n'est-il pas justement un brusque changement d'orientation d'entropie nous projetant dans cet "vitesse de lecture"?