• "Ralentissement" du temps propre à l'horizon

  • Vos questions sur les trous noirs et tous les mystères : univers parallèles, trous de vers, etc.
Vos questions sur les trous noirs et tous les mystères : univers parallèles, trous de vers, etc.
 #47402  par ceddly
 
Bonjour,

Navré, je n'avais pas bien compris que le redshift en jeu près de l'horizon apportait une réponse à la question que je me posais, je pensais plutôt à un phénomène en plus allant dans le sens de la "contradiction" que j'avançais.

Mais la réponse à la question se trouve effectivement être celle que vous avez donnée. D'ailleurs, je me suis permis de solliciter un enseignant-chercheur en cosmologie, je n'espérais pas de réponse puisque mon email ressemblait plus à une bouteille à la mer mais j'ai été agréablement surpris d'en recevoir une hier.

Je ne citerai pas son nom puisque je ne lui ai pas demandé l'autorisation, mais voici sa réponse, pour ceux que ça intéresse :

" Je comprends qu’aux abords d’un trou noir, près de l’horizon, le champs gravitationnel est si fort qu’il ralentit considérablement le temps propre et courbe l’espace.
On dit pour vulgariser qu'un téméraire qui s’y hasarderait verrait défiler devant lui l’histoire future de l’univers en accéléré, et qu’un observateur lointain verrait ce téméraire se figer quasiment dans l’éternité. Jusque là, je pense avoir compris l’essence de la relativité générale. "

Il faut être très précautionneux avec la notion de temps propre. En soit, cela est presque incorrect de dire que le champ gravitationnel ralentit le temps propre. Rien qu'en regardant une horloge ponctuelle, un observateur en chute libre ne peut pas déduire d'information sur le champ gravitationnel qu'il subit (c'est le principe d'équivalence), et c'est une telle horloge qui correspond au temps propre (il pourra cependant sonder les variations du champ par des expérience locales, c'est à dire voyant qu'un autre point près de lui sera dévié car subissant un champ gravitationnel un peu différent). Le temps propre en soit n'est jamais ralenti, puisque cela voudrait dire que cet effet serait mesurable.

Par contre, deux observateurs peuvent avoir des temps propres qui s'écoulent différent. Ce qu'il est alors possible de faire, c'est de comparer les temps propres respectifs de deux observateurs, par exemple lorsqu'ils se retrouvent, ou bien lorsqu'ils échangent des signaux. Mais des notions de causalité entrent alors en jeu, puisqu'il faut pouvoir se transmettre des signaux, et il faut considérer le temps de trajet des signaux.

"Mais quelque chose m’échappe et j’aimerais comprendre où est mon erreur. Si le temps propre aux abords du trou noir est tellement ralenti qu’il ne s’écoule quasiment plus pour un observateur lointain, si bien qu’une seconde propre équivaut à des (centaines de ?) millions d’années en dehors de son champs gravitationnel, en considérant qu’un trou noir, disons supermassif, met plusieurs millions d’années à se former et à grossir dans son temps propre, le temps qu’il faudrait pour qu'un observateur lointain ait une chance d’en observer un serait alors « infini » . Or, on en observe bien des trous noirs d’un âge avancé depuis la Terre, c.f. la détection d'ondes gravitationnelles issues de la coalescence de deux trous noirs."
C'est une très bonne question. Imaginons l'effondrement d'une étoile sphérique de masse trop importante pour contenir son propre poids. Si elle est sphérique, la position de sa surface est bien définie. Elle va alors s'effondrer jusqu'à ce que sa surface pénètre son propre horizon des événements. Un observateur extérieur verrait alors théoriquement la surface de l'étoile s'effondrer pendant un temps infini, comme vous le notez justement.

Cependant, la notion de "voir" est ici à prendre avec des pincettes. Pour des raisons de conservation de l'énergie, il faut répartir l'énergie lumineuse émise pendant la chute par exemple entre 2 fois le rayon de l'horizon et le rayon dans toute l'énergie que recevrait un observateur loin du trou noir, du moment où l'observateur voir la surface à 2 fois le rayon de l'horizon jusqu'à l'infini. Et on sent bien que le flux observé à l'extérieur doit nécessairement décroitre avec le temps...

En fait, plus la surface est proche de l'horizon, plus les photons émis sont "redshiftés" en sortant du potentiel gravitationnel : ils doivent perdre une grande partie de leur énergie pour sortir de celui-ci. Et la singularité de coordonnée à l'horizon (celle-là même qui fait que pour des coordonnées typiques extérieures au trou noir --dans la métrique de Schwarzschild par exemple-- la chute jusqu'à l'horizon prend un temps infini) fait que la puissance lumineuse reçue de l'extérieure va tendre vers zéro : le tout apparaitra bel et bien "noir".

Plus généralement, il peut être intéressant de noter que cet émission faible qui continue "jusqu'à l'infinie" peut être reliée à la radiation de Hawking des trous noirs (voir par exemple le graphe p 32 de https://arxiv.org/pdf/gr-qc/0308048.pdf, mais c'est assez technique).


J'espère que c'est à peu près clair, et que cela répond à votre question.

"Finalement, je peux poser ma question autrement : Si on dit qu'en s'approchant de l'horizon, on resterait figé dans l'éternité vu par un observateur lointain, alors pourquoi ne voit-on pas aussi, le trou noir, figé au moment de sa création ?"
Du coup c'est plutôt correct, mais ça n'empêche pas le trou noir d'être noir !
 #47403  par lodeli
 
D'après ce que tu dis, je ne comprends pas très bien perception du temps propre.
D'après une définition de base, pour une particule, c'est le temps mesuré dans son référentiel dans lequel elle est immobile
pour extrapoler, je dirais que mon temps propre m'est personnel et qu'un escargot qui se déplace à côté de moi n'est plus dans mon temps propre.
Maintenant ça devient évidemment très délicat de le définir de manière concrète :
quand je bouge le bras, quel est mon temps propre ?
 #47404  par ceddly
 
En tant que non spécialiste, je ne me hasarderai pas à expliquer ce qu'est le temps ...
D'ailleurs, il me semble que les physiciens théoriciens sont toujours en quête de la véritable nature du temps, phénomène émergent ? lié à l'entropie ?

En revanche, ce que je sais, c'est que le concept de temps n'a de sens que s'il est associé à l'espace, et il se trouve être régi par la théorie de la relativité générale, selon notre compréhension actuelle de l'univers.
Il y a d'ailleurs un problème avec la mécanique quantique, qui n'explique pas ce qu'on observe à plus grande échelle pour le temps, et inversement ...

En ce qui concerne les différences d'écoulement du temps, là c'est plutôt "clair" : on peut mesurer les différences d'écoulement du temps entre deux référentiels et si d'aventure l'un est soumis à un champ gravitationnel et pas l'autre ou se déplace et l'autre reste immobile, alors l'écoulement du temps sera différent entre les deux.
Mais l'expérience locale de mesure de l'écoulement du temps n'est en aucun cas soumise à ces différences, 1s reste 1s. Il n'y a que la comparaison qui peut permettre d'observer le phénomène.

Pour en venir à ton bras qui bouge, en grossissant le trait, tes doigts auront moins vieilli que ton corps après ce mouvement, mais d'un facteur tel qu'il est infinitésimal et donc négligeable (cf. relativité restreinte). D'ailleurs, notre tête vieilli plus vite que nos pieds à tout instant, le champ gravitationnel étant plus fort près du centre de la terre plutôt qu'à 1m80 du sol (c.f. relativité générale). Enfin, c'est tout aussi négligeable !
Dernière modification par MIMATA le vendredi 27 septembre 2019 à 18:16, modifié 1 fois. Raison : Suppression de al citation intégrale du message précédent. Utilisez simplement "Répondre" dans ce cas là.
 #47405  par lodeli
 
ceddly a écrit : mardi 24 septembre 2019 à 11:43 Pour en venir à ton bras qui bouge, en grossissant le trait, tes doigts auront moins vieilli que ton corps après ce mouvement, mais d'un facteur tel qu'il est infinitésimal et donc négligeable (cf. relativité restreinte). D'ailleurs, notre tête vieilli plus vite que nos pieds à tout instant, le champ gravitationnel étant plus fort près du centre de la terre plutôt qu'à 1m80 du sol (c.f. relativité générale). Enfin, c'est tout aussi négligeable !
tout à fait d'accord
mais le fait que ce soit négligeable n'empêche pas que ça existe .
Ce qui est fondamental pour moi et qui me fait passer pour un fou sur le site, c'est que si l'on se trouve à un point donné de notre espace spatio-temporel(au garde-à-vous), que l'on va faire un tour et que l'on revient dans la même position, on se retrouve dans la même position (ST) que si l'on ne pas bougé.
 #47406  par bongo
 
lodeli a écrit :quand je bouge le bras, quel est mon temps propre ?
A partir du moment où ton bras bouge par rapport au reste de ton corps, tu as un temps propre de ta main, de ton bras etc... et de ton corps, qui sont tous différents.
 #47407  par bongo
 
lodeli a écrit :Ce qui est fondamental pour moi et qui me fait passer pour un fou sur le site, c'est que si l'on se trouve à un point donné de notre espace spatio-temporel(au garde-à-vous), que l'on va faire un tour et que l'on revient dans la même position, on se retrouve dans la même position (ST) que si l'on ne pas bougé.
Euh... c'est une tautologie ce que tu viens de dire.
Et ce n'est pas ça l'objet de notre discorde... c'est le fait que le temps puisse être différent en fonction de l'état de mouvement... en d'autres termes, le temps n'est pas absolu, il dépend du référentiel.